Cet article a été écrit en collaboration avec la naturopathe et sexothérapeute Camille Picazo
Les transformations physiques de la grossesse.
Sujet souvent tabou, la sexualité fait pourtant parti de votre bien être et de celui de votre couple et ce, quelque soit vos évolutions. Enceinte, votre corps change, votre ventre devient plus rond, parfois gênant, vos seins prennent aussi de l’ampleur. Quelques fois, ce nouveau corps est difficile à appréhender lors des rapports sexuels, le ventre dérange, les positions ne sont pas pratiques et bien sûr les hormones ne rendent pas toujours la tâche facile. Mais rassurez-vous il existe des alternatives !
1- Appréhender les changements du 1er trimestre
C’est au premier trimestre de grossesse que le chamboulement est le plus important. Pour certaines femmes, les maux sont assez importants (nausées, vomissements, fatigue) à tel point que les moments intimes avec leur partenaire sont loin d’être dans leur esprit.
Au début de la grossesse, les hormones sont aussi responsables d’une baisse de libido. En effet, la progestérone en plus grand nombre dans votre organisme a tendance à inhiber votre libido.
Surtout ne vous inquiétez pas sur cette baisse de désir, cet état est tout à fait normal, la plupart des femmes voient leur libido se déployer au cours du 2nd trimestre. Si ce n’est pas le cas, pas de panique, chaque femme est différente. Dans ces moments, demandez le soutien de votre partenaire, vous avez besoin d’être rassurée et accompagnée dans vos changements. Le/La conjoint(e), bien souvent spectateur de métamorphoses qu’il ne contrôle pas aura certainement besoin d’être rassuré à son tour. Dans le couple, vos ressentis sont différents,la communication est la clé de votre bien-être.
Au premier trimestre, vous prenez également conscience que votre corps de femme évolue pour enfanter. Pour certaines d’entre vous, les rapports sexuels avec votre partenaire peuvent être une contradiction avec cet état d’esprit de future maman qui se met en place. Acceptez vos ressentis et surtout parlez-en avec votre partenaire.
Certaines femmes sont en fusion complète avec le futur bébé et il est difficile pour elle d’inviter le père ou le partenaire dans ce duo. Idem pour le conjoint, il peut être difficile de faire l’amour à sa femme, sachant qu’on n’est plus deux. Mais il est essentiel de parler de cette situation, de la décristalliser car après la naissance, le couple ne sera plus deux, ils devront composer avec ce troisième être qui sera en fusion avec la maman.
Sachez que chaque femme est différente, certaines voient leur libido augmenter dès le début de leur grossesse…
2- Une libido en hausse au 2ème trimestre de grossesse
Le 2ème trimestre de grossesse est souvent la période la plus appréciée. Les maux de la grossesse commencent doucement à s’envoler, vous accepter davantage votre corps qui s’arrondit, la fatigue est moins présente, le risque de fausse couche s’éloigne, en bref vous vivez pleinement votre grossesse !
Évidemment un état de bien-être entraîne avec lui une hausse de la libido. A ce stade, ce sont aussi les oestrogènes produits par le placenta qui vont augmenter votre désir.
De plus, votre évolution corporelle entraîne avec elle un allongement de vos tissus vaginaux qui seront plus congestionnés et mieux lubrifiés. Ainsi, les sensations sont augmentées et les moments intimes avec votre partenaire plus intenses.
C’est souvent au 2nd trimestre, que l’envie de faire l’amour sera la plus prononcée. Ecoutez votre désir et faites-vous plaisir !
3- Ré-inventer sa vie sexuelle au 3ème trimestre de grossesse
Au 3ème trimestre, votre ventre devient de plus en plus rond. Certaines positions ne sont plus possibles et certaines femmes trouvent la pénétration inconfortable. Ne vous forcez pas, les caresses, les massages et toutes les marques d’affection et de douceur sauront très bien remplacer pour quelques semaines vos rapports intimes. L’important est d’être à l’écoute de ses envies, les câlins avec son partenaire se réinventent, les moments à deux sont différents mais tout aussi enrichissants.
4 – Les rapports sexuels peuvent-ils être interdit pendant la grossesse ?
L’interdit est assez rare pendant la grossesse, en effet, le bien-être procuré par un moment intime ne peut qu’être bénéfique pour le couple et pour l’enfant !
En revanche, il faut savoir qu’il existe certaines contre-indications :
Si vous avez des pertes de sang
- Si vous avez un placenta praevia, c’est-à-dire placé au contre-bas de votre utérus
- Si vous avez un risque d’accouchement prématuré (l’orgasme provoque des contractions qui peut modifier le col de l’utérus)
- S’il existe un risque infectieux en cas de fissure de la poche des eaux
- Si vous ou votre partenaire êtes porteur d’herpès, pensez à utiliser un préservatif
Ces contre-indications ne sont pas rédhibitoires, sachez qu’il existera toujours des alternatives, parlez-en avec votre sage-femme.
Un changement psychologique aussi ?
La période de la grossesse est une période d’instabilité émotionnelle, psychologique pour la femme. Les repères bougent, tout change au quotidien : le corps n’est plus le même, les réponses physiologiques sont différentes, les hormones fluctuent, l’émotivité peut être au rendez-vous, les nuits sont agitées et entrecoupées de rêves plus ou moins agréables, le regard et les réactions des autres ne se font pas attendre…
Il va donc falloir faire face à plusieurs défis :
- s’habituer à sa situation, à son corps de femme enceinte
- préserver son identité de femme avec celle de mère qui se développe
- se protéger des influences extérieurs en se repliant dans un nid douillet favorable à une grossesse sans stress.
1- Enceinte, s’habituer aux changements pour accueillir sa sexualité :
Il est quand même de bon ton de rappeler que chaque femme est unique et différente. Ce qui est bon ou vrai pour l’une ne le sera pas forcément pour l’autre. Écoutons et respectons l’expérience de chacune.
Les changements internes et externes s’enchaînent et elle doit bon gré, mal gré s’adapter.
Certaines témoignent en disant avoir “détester leur grossesse”, ou “avoir vécu des moments de tristesse, de dépression ou d’angoisse terribles”.
Et d’autres adorent être enceinte, se sentent épanouie, femme, bien sur tous les plans.
Il est donc important de normaliser chaque expérience.
Cet événement de la vie nous met à fleur de peau, nous vivons tout plus intensément.
Pour mieux vivre ces changements, voici quelques pistes :
laisser tomber les jugements, les obligations, les “je dois” : vous ne devez rien du tout. Vous vous sentez mal dans votre peau, vous détestez être enceinte ou au contraire, vous vous sentez belle et merveilleuse. Tant mieux. Acceptez l’expérience que vous vivez, acceptez les émotions et les sensations qui en découlent.
“Ce n’est pas la réalité qui peut nous faire souffrir, c’est la représentation que nous en avons” – citation d’Epictète
Ou pour le dire autrement, imaginez : nous avons un arbitre dans notre tête et il est chargé de tout surveiller. Il a une idée bien préconçue sur la façon dont les choses doivent se dérouler mais aussi sur le temps qu’elles doivent prendre.
Et cet arbitre entre en jeux dans tous les plans de notre vie !
Ex : “je dois avoir 2 rapports sexuels par mois avec mon compagnon/ma compagne, sinon ça veut dire qu’on ne s’aime pas”
“je dois avoir un orgasme pendant ces rapports sexuels, sinon je suis mauvaise au lit/il est mauvais au lit”
“je dois avoir envie de mon compagnon/ma compagne, même après de longues journées”
Vous commencez à voir le problème ? Notre petit arbitre intérieur régule TOUT ! Le problème c’est qu’il crée une insatisfaction et à terme on passe de la frustration, à la colère, au désespoir.
Pour biaiser ce petit arbitre, diminuons les “je dois”, ou observons les quand ils arrivent dans notre tête, modifions nos buts (: “je dois avoir un orgasme” devient “je prend du plaisir”.), demandons nous si les moyens alloués à notre but sont réalistes : “est ce que je peux vraiment espérer avoir du désir sexuel après une journée au travail, les courses, et le fait d’être enceinte ?” (je vous donne la réponse dans le doute, c’est NON pour la plupart des femmes).
- S’offrir des moments de bien-être, de reconnexion à soi. Votre corps change, il n’est plus le même, il faut un temps d’adaptation pour accepter ces courbes qui évoluent, ce corps qui semble ne plus nous appartenir, pour continuer à se sentir “femme”.
Adopter une pratique de bien-être et de reconnexion à son corps peut être un plus pour mieux vivre ces changements :
le massage : vous offrir quelques minutes tous les jours après votre douche. Achetez-vous une huile de massage qui sent bon (et qui permet de prévenir des vergetures par exemple (l’huile à la rose de chez Weleda est un pur bonheur)). Installez-vous dans un lieu calme, où vous ne serez pas dérangé par votre partenaire/vos enfants/votre chien/le facteur. Et prenez le temps de vous masser en douceur, avec amour (vous pouvez aussi le faire devant un miroir (sans jugement par pitié) pour travailler sur l’amour que vous vous portez).
- la danse : vous pouvez être seule dans votre salon, vous allez poser une intention “je me fais du bien, j’écoute mon corps”, et au fil de la musique, vous pouvez laisser bouger votre corps, suivre les mouvements qu’il a envie d’explorer. L’objectif est de vous faire vous sentir vivante, re-découvrir les limites de votre corps, prendre conscience des changements physiques, ne faire qu’un avec son bébé. Vous pouvez lui parler en même temps, il va ressentir en plus les mouvements, le bien-être que vous ressentez, être bercé.
Pourquoi pas explorer le massage en couple, pour maintenir un contact physique satisfaisant avec son partenaire.
2- Préserver son identité de femme :
Un témoignage qui revient plus régulièrement est le fait qu’on ne voit plus la personne, la femme, qu’elle perd son identité pour devenir “future maman”, “maman de…”. Le point de focalisation, le centre de l’attention change très vite.
N’hésitez pas à en parler à votre entourage : famille, amis, partenaire. Vous êtes humaines et avez besoin d’être vu, reconnu.
Réservez-vous des temps personnels où vous pourrez vous reconnecter à vos envies profondes, à ce qui vous fait vibrer en tant que femmes. Qu’est ce que vous aimiez faire avant la grossesse ? Avez-vous toujours envie de le faire ? Si oui, profitez-en et faites le !
Il est essentiel de ne pas oublier qu’avant d’être mère, vous êtes femme. Et que pour donner aux autres et à votre enfant, il faut que personnellement vous vous soyez nourrie. On voit trop de femmes qui après l’adolescence, le départ de leurs enfants se retrouvent seule, perdue, leur vie ne fait plus sens : elles se sont perdues en tant que femmes.
3- Les influences extérieures de la grossesse
En tant que femmes, nous sommes soumises à des injonctions diverses (sociétale, familiale, culturelle), mais la grossesse et la maternité sont des situations encore plus particulières ou tout le monde a son mot à dire, de la voisine, à la grand-mère et à la femme croisée à la caisse du magasin bio (ne parlons même pas de votre naturopathe, qui sait toujours tout mieux que vous…).
Protégez-vous, choisissez vos interlocuteurs : la copine hyper négative ou la belle-mère qui a peur de tout ? Ce n’est même pas la peine de leur parler, vous allez vous fatiguer, usez de votre énergie…
La grossesse et l’accouchement sont des évènements naturels de la vie, nous portant la vie depuis des milliers d’années, ces actes sont inscrits dans nos gènes. Viscéralement, nous savons comment faire, quoi faire.
Il est bon de se reconnecter à son corps, à ses sensations, à son intuition, à la petite voix à l’intérieur qui vous dit que mettre ton bébé dans une chambre à part dès le premier jour, ce n’est pas possible / accoucher avec/sans péridurale c’est normal. Ecoutez-vous, faites-vous confiance, vous avez les clés, les réponses en vous !
Sexualité pendant la grossesse, le point de vu du partenaire.
Et si nous nous placions à la place de votre conjoint(e) ? Car pour lui aussi, les changements physiques et hormonaux de sa partenaire ont un impact sur sa sexualité. Il doit endosser un rôle protecteur, rassurant tout en acceptant des changements qui ne sont parfois pas si évident pour son désir d’homme ou de femme. Il ne faut pas que ce sujet soit tabou pour lui/elle. Parfois son désir envers sa partenaire diminue, il doit lui aussi s’habituer à des formes qui s’arrondissent, à un ventre plus imposant que d’habitude.
Psychologiquement, le chamboulement n’est pas négligeable pour votre partenaire. En effet, faire l’amour à sa femme qu’il désire en tant qu’amante devient petit à petit la mère de leur futur enfant. Celui-ci étant, de plus, déjà présent et au première loge lors des rapports. Certains conjoint(e)s se trouvent alors bloqués et les rapports sont pour eux impossibles. Il est important de respecter cet état et de ne pas forcer un désir qui ne vient pas. Dans ce cas, les moments intimes se réinventent sous forme de caresses, massages ou tout autres actes de tendresse.
Beaucoup de partenaires ont également peur de faire mal à la future maman et au futur bébé, mais il n’en est rien et au contraire !
En tant que femme, il sera important de rassurer votre partenaire sur vos changements physiques, vos envies, montrez lui ce qui vous fait plaisir et que votre désir est toujours là.
La sexualité pendant la grossesse reste un échange qui se veut rassurant pour l’un et pour l’autre. Continuez à accroître cette complicité amoureuse qui vous sera indispensable à l’arrivée de bébé.
——————————-
Nos témoignages reçus
Voici quelques témoignages que nous avons recueillis pendant la rédaction de cet article, les noms des femmes qui se sont confiés ont bien évidemment étaient changés. Milles merci à elles pour leur partage d’expérience et leur confiance !
- X :
“J’ai toujours recherché l’épanouissement sexuel, j’ai une libido qui fonctionne bien.
Je suis enceinte de 3 mois et demi. On dit que la libido baisse au premier trimestre à cause des douleurs, nausées, fatigue, peur de fausse couche. Pour moi, ça allait.
Depuis le début du 4e mois environ, j’ai très envie de faire l’amour avec mon chéri. Ma libido se boost encore plus !
Le corps d’une femme enceinte change. ..J ai tjs fais attention à mon poids… J’ai pris 4 kg je crois… Ton bassin s’élargit… Il faut l’accepter. Sinon, les gros seins, c’est super, je garde !
Mon partenaire est content. Il est moins demandeur de sexe que moi mais il se laisse vite prendre au jeu ! Si je grossis, c’est pas grave pour lui, c‘est normal pour la santé du bébé, il me soutient. Il aime aussi les gros seins et les formes d’une femme. Il a peur parfois pour le bébé…
On fait l’amour tous les jours. Une fois. Très épanouie. Plus libre. Plus d’envies et de demandes.”
- X :
“Pour ma part ça n’a pas été facile au début notamment à cause des symptômes du début de grossesse (nausées, vomissements, grande fatigue..), il faut avouer que les rapports n’étaient pas une priorité car j’étais mal physiquement.
Une fois le premier trimestre passé, les symptômes ont disparu et j’ai enfin pu commencer à me sentir bien et à profiter de ma grossesse. Je fais partie des femmes dont le corps manifeste rapidement la grossesse. À 3 mois, j’avais déjà un jolie petit ventre rond, il a fallu faire avec et accepter que mon corps change de semaine en semaine.
Aujourd’hui, je suis à 5 mois de grossesse et je me sens très bien dans mon corps de femme enceinte. Mon ventre continu de s’arrondir, bébé me fait savoir qu’il est là…
Et ma libido est enfin revenue ! Non pas qu’elle soit réellement partie en début de grossesse mais avec les nausées et les vomissements je dormais tout le temps, j’avais besoin de repos et j’ai laissé notre vie intime de côté. Actuellement, notre vie sexuelle va très bien, je dirais même qu’avec les hormones, ça va même plus que très bien. Je me rend compte que la grossesse et les hormones augmentent la libido.
Pour mon conjoint, tout se passe bien aussi. Assez inquiet au début de me voir aussi mal, il a été très compréhensif. Il se rend compte lui aussi du changement de ma libido avec la grossesse. Et concernant mon physique et surtout mon ventre qui prend de plus en plus de place, il ne m’a jamais dit que ça le dérange. Il trouve ça beau et me le dit souvent ce qui m’aide aussi à m’accepter.”
- X :
“Ma libido est différente de ce qu’elle était avant, je dirai qu’elle a augmenté. Il faut dire que j’étais sous anti-dépresseurs avant et quand nous avons voulu commencer à concevoir j’ai arrêté les médicaments. Nous avons eu beaucoup de chance et je suis tombée enceinte le premier mois d’essai, du coup, je ne suis restée qu’un mois sans antidépresseur. Donc oui, ma libido est plus forte que quand j’étais sous antidépresseur mais je ne saurai dire elle est plus forte que quand je ne suis pas sous traitement.
Ma libido a changé au fil des mois: le premier mois, rien de particulier, le deuxième mois ,libido à 0, j’étais tellement nauséeuse et fatiguée. A la fin du troisième mois, les nausées ont passées et ma libido est montée en flèche. Je dirai que depuis c’est assez constant
J’ai eu du mal a accepté que mon corps change au début. Je me trouvais ridicule avec ce ventre qui commençait à sortir mais au plus mon ventre s’arrondit au plus je l’assume. Je suis assez (j’étais haha) fine et du coup mon ventre s’est assez vite vu, du coup les commentaires du genre « oh mon dieu mais tu es bien grosse », etc n’ont pas aidé. A part le coté esthétique, je me sens plutôt bien dans mon corps, j’apprends à m’écouter tous les jours un peu plus, et surtout à écouter ce que veut bébé!
Mon mari me soutient énormément, mais pas dans le sens ou il me considère comme une pauvre petite chose sur laquelle on pleure, mais il est la pour me motiver.
Au tout début, il y a un gros risque de fausse couche. C’est un poids assez dur a porter en temps que femme, car on se sent responsable si on perd le bébé. Mon mari m’a toujours dit: “je suis content que tu sois enceinte mais il est possible que ce bébé ne tienne pas et c’est ok, c’est juste que ce n’était pas censé arriver”. Ca m’a beaucoup aidé.
Il me complimente sur mon corps, sur les changements qui s’opèrent… J’ai eu des saignements au début du mois à cause de mon placenta qui est positionné trop bas, du coup nous n’avons eu qu’un rapport depuis (j’ai trop peur que les saignements recommencent) mais mon mari le comprend très bien et il ne me force pas ou ne me fait pas sentir comme si c’était ma faute, ce qui est bien appréciable.
Du coup, non la je ne suis pas très satisfaite de ma vie sexuelle vu que ca commence a être un peu long !”